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DANTE ALIGHIERI

DANTE ALIGHIERI

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Le 8 avril 1341, à Rome, le poète reçois la couronne de lauriers des mains du sénateur Orso. C'est la première fois qu'un érudit est ainsi honoré. Le laurier qui ceint son front est le symbole d'Apollon, antique divinité de la poésie. Il nous a donné le mot... lauréat. Mais Rome qu'il a tant aimée sombre dans la violence tombe sous la férule d'un tyran républicain excentrique, Rienzo. Pétrarque use de son influence auprès du pape pour lui sauver la mise quand il est renversé et transféré en Avignon. Le poète voit sa fin de vie entachée par des drames intimes dont la mort de l'inaccessible Laure, victime de la Grande Peste de 1348, et celle de Giovanni, un fils qu'il a eu d'une maîtresse. Il ira successivement à Venise, Padoue puis, finalement, Arquà, dans les monts Euganéens, où il s’était retiré avec sa fille.

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Ce poète célèbre immortalise la fontaine de Vaucluse, Laure et lui-même. Après la mort de la belle Laure, il se fixa à Arqua, gros village à 4 lieues de Padoue, situé sur le penchant d’une colline, pays fameux par la salubrité de l’air, par sa position riante et la beauté de ses Vergers. Il fait bâtir, en haut de ce village, une maison petite, mais agréable et commode. Dans les derniers temps de sa vie, une fièvre sourde l'affaibli, sans qu’il veuille rien changer à son train de vie. Il lit ou écrit sans cesse, il écrit surtout à son ami Boccace, dont il lit alors le Décaméron pour la première fois, cet ouvrage, l'enchante. Ce qu’on y trouve de trop libre, lui paraît suffisamment excusé par l’âge qu’a l’auteur, quand il le fait, par la légèreté du sujet et celle des personnes qui doivent le lire. L’histoire de Griselidis le touche jusqu’aux larmes. Il l’apprend par cœur pour la réciter à ses amis ; enfin, il le traduit en latin pour ceux qui n’entendent pas la langue vulgaire, et il envoie cette traduction à Boccace. La lettre dont il l’accompagne est peut-être la dernière qu’il ait écrite...

Peu de temps après, ses domestiques le trouvent dans sa bibliothèque, courbé sur un livre et sans mouvement. Comme ils ont l'habitude de le voir souvent passer des jours entiers dans cette attitude, ils n’en sont point effrayés ; mais ils reconnaissent bientôt qu’il ne donne aucun signe de vie ; la maison retentit de leurs cris : il n’est plus... Il est mort d’apoplexie, ce 18 juillet 1374, âgé de 70 ans.

Le bruit de sa mort, qui se répand aussitôt, cause une grande consternation. François de Carrare, et toute la noblesse de Padoue, l’évêque, son chapitre, le clergé, le peuple même, se rendent à Arqua, pour assister à ses obsèques, qui sont magnifiques. Peu de temps après, François de Brossano, qui a épousé sa fille, fait élever un tombeau de marbre, sur 4 colonnes, vis-à-vis de l’église d’Arqua, et y fait transporter le corps, ou l'on grave une épitaphe fort simple, en 3 vers latins assez mauvais... Ce monument existe encore que visitent tous les amis de la poésie...

Supérieur à tous les préjugés nuisibles qui subjuguent alors les esprits, il combat sans relâche, dans ses traités philosophiques, dans ses lettres, dans ses entretiens, l’astrologie, l’alchimie, la philosophie scolastique, la foi aveugle dans Aristote et dans l’autorité d’Averroès. Sa compassion et son mépris pour les erreurs de son temps, le remplissent d’admiration pour la saine et vénérable antiquité. Il apprend à ses contemporains le prix qu’on doit attacher aux monuments des arts et des lettres que le temps n’a pas détruits.

La postérité a jugé Pétrarque, pour ses prétendues bagatelles, comme le créateur de la poésie lyrique chez les modernes. Le sonnet devient entre ses mains si parfait qu’on ne peut rien y ajouter depuis. Et ses odes et ses sonnets sont remplis et surabondent, en quelque sorte, de pensées neuves et choisies, d’expressions fortes et délicates à la fois. Les sentiments qu’il exprime paraissent, trop raffinés, ou trop assaisonnés par l’esprit, pour partir véritablement du cœur.

Il faut, être insensible aux beautés poétiques et aux beautés morales, pour ne pas apercevoir dans la poésie de Pétrarque un caractère original, un pathétisme d’un genre particulier, mais cependant réel, et qui naît de la persuasion intime et des affections profondes du poète ; une richesse d’images, une profusion, une grande dignité de pensées philosophiques et morales, une érudition choisie et sagement employée, et surtout un style si pur, si harmonieux et si doux, que, parmi un grand nombre de morceaux dont il est aisé de faire choix, il en est peu qui, comme les vers d’Homère, de Virgile, de Racine et de La Fontaine, ne se gravent dans la mémoire, sans effort, et comme d’eux-mêmes...

La nature, qui a prodigué à Pétrarque les dons de l’esprit et du cœur, lui a également donné, une taille élégante, de beaux yeux, un teint fleuri, des traits nobles et réguliers.

Un dernier trait fera voir combien il est constant dans ses affections, et quelle est, jusqu’à la fin de sa vie, la disposition habituelle de son âme. On connaît sa vénération et son amour pour Virgile... Virgile, comme Cicéron, est sans cesse auprès de lui. Le beau manuscrit, sur vélin, avec le commentaire de Servius, qui sert a son usage, et sur lequel sont écrites des notes de sa main, est un des plus célèbres qui existent. Parmi les notes latines dont il est enrichi, on distingue surtout la première, qui est en tête du volume. En voici la traduction entière et littérale :

[« Laure, illustre par ses propres vertus, et longtemps célébrée par mes vers, parut, pour la première fois, à mes yeux au premier temps de mon adolescence, l’an 1327, le 6 du mois d’avril, à la première heure du jour (six heures du matin), dans l’église de Sainte-Cécile d’Avignon ; et dans la même ville, au même mois d’avril, le même jour 6, et à la même heure, l’an 1348, cette lumière fut enlevée au monde, lorsque j’étais à Vérone, hélas ! ignorant mon triste sort ! La malheureuse nouvelle m’en fut apportée par une lettre de mon ami Louis. Elle me trouva à Parme la même année, le 19 mai au matin. »

« Ce corps si chaste et si beau fut déposé dans l’église des Frères-Mineurs, le soir du jour même de sa mort. Son âme, je n’en doute pas, est retournée, comme Sénèque le dit de Scipion l’Africain, au ciel, d’où elle était venue. Pour conserver la mémoire douloureuse de cette perte, je trouve une certaine douceur mêlée d’amertume à écrire ceci, et je l’écris préférablement sur ce livre qui revient souvent sous mes yeux, afin qu’il n’y ait plus rien qui me plaise dans cette vie, et que mon lien le plus fort étant rompu, je sois averti par la vue fréquente de ces paroles, et par la juste appréciation d’une vie fugitive, qu’il est temps de sortir de Babylone : ce qui, avec le secours de la grâce divine, me deviendra facile par la contemplation mâle et courageuse des soins superflus, a des vaines espérances et des événements inattendus qui m’ont agité pendant le temps que j’ai passé sur la terre. »]

Ces Poésies éparses (Rime disperse), qu’il considère comme des pièces inabouties, des ébauches de poèmes, qui ne peuvent figurer dans le recueil du Canzoniere. Père de la poésie moderne et de la culture humaniste, auteur en langue vulgaire de cet immortel Canzoniere (Rerum vulgarium fragmenta), qui a suscité des foules d'imitateurs en Italie et dans toute l'Europe et qui a marqué la poésie amoureuse en Occident jusqu'au romantisme et au-delà, et d'une œuvre en latin, impressionnante par sa masse, Pétrarque se présente comme une sorte de Janus regardant à la fois vers le passé et vers l'avenir, l'Antiquité et la chrétienté, la frivolité et le recueillement, le lyrisme et l'érudition, la turbulence et le repos, l'intérieur et l'extérieur.

Avide des biens et des plaisirs de ce monde, follement ambitieux, actif, entouré d'une légion d'amis, de disciples, d'adulateurs, flatté et sollicité par les puissants, tenté et très souvent séduit par la politique, il est aussi ce méditatif épris de la solitude dans laquelle il s'est enfermé pendant longtemps et qu'il a élevée au rang d'un mythe...

Voyageur infatigable, curieux des mœurs et des choses, amant intrépide de la nature et en même temps érudit, archéologue, philologue, lecteur subtil et passionné des auteurs latins, promoteur de l'étude du grec, même lorsqu'il est tourné vers les Anciens, il est plongé dans l'actualité : conformément à son double rôle de précurseur et de médiateur, il cherche moins, dans les œuvres du passé qu'il admire, des modèles à copier qu'un moyen, en renouant avec les traditions, en retournant aux origines, d'aller de l'avant, de créer ce monde moderne où la morale et la philosophie de l'Antiquité et la foi chrétienne se fondraient, réconciliées.

Les années de jeunesse et la formation

Je m’en vais en pleurant...

Je m’en vais en pleurant sur mon passé
et je me repose sur l’amour des choses mortelles,
sans m’élever à toute volée, ayant moi-même des ailes,
pour peut-être ne pas donner de moi mauvais exemple.

Toi qui vois mes maux indignes et sacrilèges,
Roi du ciel invisible et immortel,
va secourir l’âme détournée de toi et frêle,
et remplis son défaut de ta Grâce:

Si moi, j’avais vécu de guerre et de tempête,
je serais mort en paix et à bon port;
si la partie fut vaine, au moins qu’elle soit honnête.

Pour le peu qu’il me reste à vivre
et à mourir, je désire être prêt dans ta main:
tu sais bien qu’en personne d’autre est mon espérance.

Traduit par: Catherine Réault-Crosnier et Irna Dubreuil

Des cheveux d’or

Il était une fois des cheveux d’or
Des cheveux d’or qui s’envolaient en mille doux lieux,
Et la lumière vague brûlait étrangement,
Les beaux yeux ne sont pas aussi faibles qu’ils paraissent.

Et je les vis de la pitoyable couleur des farces,
Je ne sais si c’était vrai ou faux, il me semblait
Que l’appât amoureux arrivait à ma poitrine,

Quelle merveille est si vite brûlée?

Les pas ne sont pas chose mortelle
Mais angéliques formes; et les paroles
Sonnent autrement, pure voix humaine.

Un esprit du ciel, un vivant esseulé,
Exista comme je vis; et sans limites,
La plaie ne guérit pas, une fois l’arc détendu.

Traduit par: Catherine Réault-Crosnier (ce poème me fait irrésistiblement penser à notre gentille amie)

Le Chansonnier

Nulle paix je ne trouve, et je n'ai pas de guerre à faire :
Je crains et j'espère; je brûle et je suis de glace.
Et je vole au plus haut des cieux, et je gis à terre;
Et je n'étreins nulle chose, et j'embrasse le monde entier.

Qui me garde en prison la porte ne m'ouvre ni ne ferme,
Ni ne me tient pour sien, ni ne défait les liens;
Amour ne me tue pas et ne m'ôte pas mes fers,
Ne me veut pas vivant, et ne vient pas à mon secours.

Je vois et n'ai point d'yeux, et sans langue je crie;
Et je désire périr, et demande de l'aide;
Et pour moi je n'ai que haine et pour autrui qu'amour

Je me repais de ma douleur, et en pleurant je ris;
Également m'insupportent vie et mort :
En cet état je suis, Madame, pour vous.

traduit par: Jean-claude Monneret

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